Si la première impression de Rain vis à vis de Degrassi avait été franchement mauvaise, sa vision avait réellement évolué. Enfin, il faut se mettre à sa place: se faire acceuillir par sa cousine austère et son colocataire boudeur dans un appartement digne d'un taudis exigu n'était pas réellement quelque chose d'appréciable. Surtout lorsqu'on était particulièrement exigeante. Seulement Rain avait finalement réussi à trouver des qualités à cette petite ville et des distractions amusantes grâce au merveilleux site de Spirit grâce auquel elle avait déjà tout su des histoires qui se tramaient ici avant même d'arriver. Ce qui l'avait bien évidemment aidé à s'intégrer plus facilement et à grimper aussi rapidement sur l'échelle sociale. Enfin, ce n'avait été qu'un petit coup de pouce qui ne devait en rien réduire son succès. Rain se savait belle, intelligente, faussement candide et surtout assez hypocrite pour réussir ce à quoi elle se destinait. Et une fois que c'était fait, c'était terriblement lassant. Elle aimait les défis parce qu'elle les réalisait tous haut la main, mais c'était également le genre de personne à se lasser de tout et de n'importe quoi. Enfin, pour l'instant elle ne se lassait pas de son antipathie grandissante pour Manny Santos et n'allait pas se gêner pour lui mettre des bâtons dans les roues sans avoir l'air d'y toucher. Devoir lui annoncer la traîtrise du garçon qu'elle aimait éperdument avait été jouissif. Feinter la compassion encore plus. Rain savait que Nicholas était bien la première personne à pouvoir la comprendre, même si au fond d'elle, elle était persuadée que faire en sorte qu'il sorte avec Manny avait été une mauvaise idée, étant donné qu'il finirait par en tomber amoureux et à forcément devenir faible et inintéressant. Cette fille était une vraie garce: elle réussissait en étant gentille et aimable, c'était un comble. Rain ne pouvait le supporter étant donné qu'elle avait du mal à accepter qu'il fallait avoir l'air adorable, parfaite et lisse pour réussir. Foutaises. Manny Santos représentait donc tout ce qu'elle détestait alors qu'en réalité, ce n'était qu'une catin opportuniste qui avait couché avec la moitié de la ville. Voilà pourquoi Rain adorait Caitlin. Vraiment. Elle l'adorait comme elle adorait sa Barbie préférée étant en enfant, celle avec qui elle jouait en permanence avant de la décapiter sur un coup de colère ou parce que ses cheveux devenaient impossible à coiffer. Ou alors simplement parce qu'un modèle carrément mieux venait de sortir. Rain avait sans cesse besoin de nouveaux divertissements et l'innocente rousse jouait pour l'instant parfaitement bien son rôle. Elle était le genre de fille dévouée, obsédée par la popularité et prête à tout pour réussir, une sorte de parfait petit soldat, ceux que l'on jetait en première ligne comme chair à canon. Hum, la comparaison était quelque peu glauque mais pourtant tellement vraie. La jolie blonde était persuadée que son homologue rousse passerait de la petite ingénue qu'elle était à une vraie trainée en rien de temps. Bien sûr, cela ne l'amuserait qu'un temps et Rain serait par conséquent contrainte de la laisser tomber. Mais pas avant qu'elle n'ait touché le fond, évidemment. Et qu'elle n'ait volé à Manny les garçons qui ont réellement comptés pour elle. Petite question existencielle: qui de Craig ou Collin a eu la plus grande importance dans le coeur de cette salope brune aux grosses cuisses ? Rain se promettait de poser innocemment la question à son amie capitaine des pompom girls lorsque la sonnette retentit - merci mon dieu, elle avait enfin quitté le taudis, sa cousine et Manu-boudeur. Rain se leva du canapé sur lequel elle était en train de lire un livre de Nietzsche - oui, la culture primait avant tout - et prit le temps d'admirer son reflet dans le miroir avant d'aller ouvrir, au cas où elle attendait une visite de la plus haute importante. Ah, non, c'était sa petite poupée animée. Rain afficha un sourire pas forcément bienveillant avant d'ouvrir la porte et de le transformer en moue ravie absolument adorable, offrant une bise spontanée à Caitlin, qui avait encore l'air d'une petite fille toute sage dans sa tenue parfaitement repassée. Que c'était attendrissant.
- Tiens Caitlin, quelle bonne surprise. Justement, j'allais t'appeler. (Même si c'était faux, ce genre de phrases faisait toujours plaisir) Tu vas bien ?